Le gouvernement Legault avance
by Jean-Marc SalvetCHRONIQUE / Même si elles ont été imposées par des nécessités, il n’empêche que c’est une semaine de bonnes décisions pour le gouvernement Legault; une semaine d’avancées dans de meilleures directions que celles qui existaient en tout cas.
Sur l’élargissement du système de consigne, il fallait trancher à un moment ou l’autre. Ce dossier traîne depuis des années. Il a été étudié sous les gouvernements de Jean Charest, de Pauline Marois et de Philippe Couillard. Sans jamais de conclusion.
Élargissement du système de consigne? Amélioration des différents maillons de la collecte sélective — de tout ce qui tourne autour du bac de récupération? Au fil des ans, les tergiversations et le flottement ont nui à la récupération en général parce que rien n’a été pris à bras-le-corps.
Ces tergiversations et ce flottement ont contribué à la «crise du recyclage» au Québec. Les centres de tri débordent et les sites d’enfouissement aussi.
Il fallait soit élargir le système de consigne, soit améliorer la collecte sélective afin que le tri s’effectue mieux à la base.
Le fait qu’une direction soit enfin donnée envoie un message à tous. C’est d’abord pour cela que la décision d’élargir la consigne «à tous les contenants de boisson prête à boire de 100 ml à 2 litres», y compris aux bouteilles de vin, est positive.
À terme, des pénalités seront imposées aux entreprises mettant en marché des contenants de boisson si elles n’atteignent pas les objectifs de récupération fixés. Mais les autorités publiques devront faire en sorte que le système fonctionne. Les modalités devront être efficientes.
Question subsidiaire : les montants actuellement envisagés pour la consigne seront-ils vraiment suffisants pour convaincre tout un chacun de retourner les contenants? Ils devront sans doute être revus à la hausse.
À terme, il faudra finir par interdire tous ces contenants et emballages qui ne sont pas recyclables. Et chacun devra consommer plus intelligemment. De tous les R qui existent — pour réutilisation, récupération, recyclage, etc. —, il faudrait davantage penser à celui par lequel commence le mot «réduction».
Ce dossier nous rappelle que l’année 2020 sera celle du ministre de l’Environnement, Benoit Charette, sur la scène politique québécoise. Il passera de l’arrière à l’avant-scène politique. Il vient de présenter son plan de consigne élargie. Il dévoilera dans quelque temps celui portant sur la réduction des gaz à effet de serre. Il y travaille depuis un an. Ce plan devra nécessairement être costaud pour réellement parvenir à une diminution de 37,5% des émissions par rapport à 1990.
Autre avancée
Le nouveau tracé du troisième lien est un lapin sorti d’un chapeau, affirme le libéral Gaétan Barrette. Il est vrai que l’option «centre-ville à centre-ville» constitue un revirement par rapport à celle qui était privilégiée jusqu’ici.
Même si c’est par la force des choses, le ministre François Bonnardel fait preuve d’humilité en reconnaissant que le tracé finalement abandonné n’était pas la meilleure option, comme il le prétendait. Il était même totalement absurde qu’il soit situé aussi à l’est des coeurs urbains de Québec et de Lévis.
Le nouveau tracé intègre ce futur troisième lien au réseau de transport structurant de la capitale. C’est un gros plus. C’est l’autre avancée de la semaine. Dans ce plan, ce n’est pas le réseau structurant qu’il faut tenter de rapprocher du tunnel; c’est ce dernier qui se branche à la logique du futur système de transport collectif.
Puisque le gouvernement Legault n’abandonnera pas son engagement électoral de bâtir ce troisième lien, il a politiquement intérêt à susciter le plus d’adhésion possible autour de lui. Ainsi qu’à l’appuyer sur du transport en commun pour être cohérent avec ses nouvelles ambitions environnementales. Voilà pour la base.
Ce tracé doit cependant être vu comme une ébauche. Le ministre Bonnardel est d’accord. Il dit avoir pris note de toutes les interrogations ayant trait à l’extrémité du tunnel dans le quartier Saint-Roch. À l’Assemblée nationale, la solidaire Catherine Dorion et le libéral Gaétan Barrette s’inquiètent fortement de cette extrémité. Avec raison.
Ils ne sont évidemment pas les seuls.
L’extrémité du tunnel à Québec devrait être repoussée plus au nord. Dans tous les cas, le réseau routier tout autour de ce futur point devrait être aménagé de manière à ce que les automobilistes de la Rive-Sud devant se rendre au centre-ville de Québec ou sur la Colline parlementaire ne voient pas d’intérêt à revenir sur leurs pas — à l’emprunter en voiture, donc. L’ensemble devrait être conçu de manière à ce qu’ils privilégient le moyen de transport en commun qui circulera dans ce tunnel.
Cela étant, il est difficile d’imaginer que le gouvernement laisserait croître des inquiétudes chez des automobilistes venant déjà de plus au nord et qui pourraient voir leurs propres difficultés augmenter avec plus de véhicules dans ce secteur.
Les libéraux et d’autres s’interrogent aussi avec raison sur ce qu’il adviendra de plusieurs terres agricoles du côté de Lévis.
Au-delà de ces questions déjà incontournables, celle des coûts demeurera fondamentale. Pour l’heure, on est dans un noir absolu là-dessus.
Pour l’heure aussi, on est cependant dans un projet amélioré par rapport à ce qui était proposé. Une grande et sérieuse discussion collective peut enfin s’engager. C’est pour cela que c’est un bon revirement.
Malgré tout ça, pour ce qui est de la réalisation d’un tel projet, il y a encore loin de la coupe aux lèvres.
La 3e avancée
La troisième avancée de la semaine s’est produite lundi lorsque la ministre de la Santé, Danielle McCann, a reconnu que son gouvernement a commis une erreur en annonçant l’ouverture prochaine de l’aide médicale à mourir à certaines personnes souffrant d’une maladie mentale sévère. Elle a finalement demandé la suspension de l’application de ce volet — qui devenait possible avec le retrait du critère de «fin de vie» de la loi québécoise.
Mme McCann ne pouvait pas s’entêter, tant l’incompréhension était grande dans la population. Et surtout parce que cette éventuelle ouverture doit au préalable faire l’objet d’un large et vaste débat.
Il devra entre autres impliquer toute l’Assemblée nationale. C’est impératif.