Arielle Dombasle, une « extraterrestre » au Festival de Gérardmer

« 20 Minutes » a rencontré Arielle Dombasle, membre du jury de la 27e édition du Festival du film fantastique de Gérardmer

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De notre envoyé spécial à Gérardmer (Vosges)

Avant de commencer l’interview, Arielle Dombasle allume une cigarette. Dans le cosy espace lounge du Grand Hotel de Gérardmer, le geste a l’air d'une amusante bravade. A peine a-t-elle entamé la réponse à la première question qu’une employée du lieu vient délicatement lui indiquer la direction du fumoir. L’actrice la remercie poliment mais préfère écraser son mégot dans une tasse de café vide improvisée en cendrier. Puis elle se penche légèrement en avant, comme pour nous livrer une confidence. « Ça m’a permis d’avoir quelques taffes, je savais très bien que je n’avais pas le droit », lâche-t-elle d’une voix basse et amusée.

Si l’interdiction de fumer dans les lieux publics avait été enfreinte par une autre personnalité, on y aurait sans doute vu un caprice de diva ou une incivilité de privilégiée. Or, cette clope entre les doigts d’Arielle Dombasle semblait parfaitement à sa place, comme une énième touche pointilliste à son image fantasque. On n’attend surtout pas d’elle de se fondre dans le décor.

D’ailleurs, la veille au soir, lors de la cérémonie d’ouverture du Festival du film fantastique – raison de sa venue dans les Vosges –, on ne voyait qu’elle sur la scène au milieu de ses camarades du jury longs-métrages. Ses acolytes, y compris la présidente Asia Argento, avaient opté pour du blanc ou du noir. Elle, était en jupe à imprimé écossais tandis qu’un foulard au motif rappelant le tartan contrastait sur son haut sombre. On a vu plus excentrique, mais il n’empêche, elle était celle que l’on remarquait le plus.

« Je suis une boule à facettes. »

Comme on couvre l’événement faisant la part belle au cinéma de genre, on se hasarde à lui demander si cela lui va d’être qualifiée d'« extraterrestre ». « J’aime bien cette idée parce qu’il y a le lien entre le ciel et la terre et l’alien, ce qui vient d’ailleurs. Ce n’est pas vraiment quelque chose que j’entretiens, assure-t-elle. Je suis issue de trois cultures, celle du Mexique, où j’ai vécu dix-huit ans, de l’Amérique, où je suis née, et de la France. Je suis une boule à facettes. »

Une boule à facettes qui, à Gérardmer, est chargée de réfléchir sur les longs-métrages en compétition. D’ici à la révélation du palmarès, dimanche, elle en aura vu dix. Ses critères d’évaluation ? « Le style et la grammaire cinématographique. ». Son choix se portera vers les films qui seront « au carrefour de l’esthétique, de la politique, de l’éthique et du big thrill. »

Souhaitons-lui de retrouver le grand frisson éprouvé en découvrant, à 13 ans, L’Ange exterminateur de Luis Bunuel, qu’elle présente spontanément comme l’un des films qui l’effraie le plus. « Cela montre comment, insidieusement, le chaos s’infiltre dans un ordre social. Comment on perd pied », souligne celle qui cite aussi Cronenberg, Lynch et Kubrick parmi son panthéon horrifique.

« Je suis difficile à cerner et je pense que mon cinéma l’est aussi »

Pour elle, la peur au cinéma, « on se l’inflige comme un bonbon, une douceur ». « Il y a des peurs qui peuvent vous suivre toute la vie. Quand j’ai trop peur, je ferme les yeux parce que je ne veux pas qu’il y ait une image qui vienne me ravager jusqu’à la fin de ma vie », ajoute-t-elle, contredisant presque son argument confiserie. Arielle Dombasle n’est pas à un paradoxe près.

« Je suis difficile à cerner et je pense que mon cinéma l’est aussi », avance-t-elle. Samedi, les festivaliers auront l’occasion d’en juger : son film Alien Crystal Palace, sorti l’an passé, sera projeté dans le cadre de la « nuit décalée ». Elle y incarne une réalisatrice underground qu’un savant prédicateur entreprend d’unir à un rockeur pour former « l’androgyne », le couple idéal… « C’est un film qui a été qualifié de mélo post-punk. J’ai le sentiment que le public de Gérardmer est exactement celui qui va entrer dans ce cosmos du désir, dans ce kaléidoscope de tableaux », pressent l’actrice et réalisatrice.

L’entretien touche à sa fin quand Asia Argento la rejoint à sa table. En apprenant qu’Arielle Dombasle a fumé une cigarette à cet endroit même, elle lui adresse un sourire et glisse qu’elle n’aurait pas osé.

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