Réforme des retraites : cette nouvelle piste pour rassurer les agents des régimes spéciaux et les fonctionnaires

Pour limiter les pertes du passage entre le régime actuel et universel, des compensations pourraient être mises en place pendant la période de transition. Une proposition visant principalement les fonctionnaires et les agents des régimes spéciaux.


Proposer un maximum de solutions pour rassurer. C’est la méthode que semble avoir choisi l’exécutif ces derniers jours. Après avoir mis l’équilibre du système un peu de côté et annoncé que la réforme ne concernerait peut-être pas les générations nées à partir de 1963, le gouvernement réfléchirait à mettre en place des bonus lors de la phase de transition entre le régime actuel et le régime universel. D’après les Echos il s’agirait d’offrir “à certains salariés un coup de pouce au démarrage”. Le quotidien économique parle d’un “cadeau de bienvenue” au moment de la conversion en points de leurs droits acquis “afin de compenser les pertes qu’ils risquent de subir lors de la bascule dans le régime universel”.

Seraient principalement concernés les fonctionnaires, les agents des régime spéciaux mais aussi les salariés du privé nés dans les années 1980 qui auraient quasiment effectués la moitié de leur carrière dans le régime actuel. “Pour un assuré né en 1980 qui n'aurait travaillé que vingt et un an et demi, soit une demi-carrière, on calculerait le salaire de référence sur les 12,5 meilleures années. Cela permettrait d'éliminer les années de vaches maigres”, assurent les Echos. Interrogé par Capital pour savoir si de telles pistes sont envisageables, le haut-commissaire aux retraites botte en touche. “Attendons les arbitrages du Premier ministre, ils arrivent dans 48h …”, répond-t-on dans son entourage.

Mais si cette option était retenue, elle pourrait participer aux mesures de compensation, notamment pour les enseignants qui craignent de voir leurs pensions s’effondrer avec le régime universel. Pour ces derniers, comme pour les autres, lors de la phase de transition, le rapport remis en juillet dernier par le haut-commissaire, Jean-Paul Delevoye préconise de faire “une photographie des droits relatifs à la carrière effectuée au 31 décembre 2024”. Droits qui ensuite seront transformés en points du nouveau système. Problème, lorsque la retraite est calculée sur les six derniers mois de salaire, comme c’est le cas pour les fonctionnaires, mécaniquement la conversion se fera sur un salaire plus bas. D’où l’idée de mesures de compensation. “Prenons une base 100 de rémunération en 2024, on pourrait très bien regarder la marge de progression habituelle des carrières et réévaluer cette base 100 au moment de la transition afin d’accorder ainsi plus de points pour compenser”, imagine Philippe Crevel directeur du cercle de l’épargne. Tout dépend de la philosophie privilégiée, estime Valérie Batigne, dirigeante de Sapiendo, cabinet d’expertise retraite. “Soit vous trouvez un moyen d’augmenter la retraite en donnant des points gratuits, soit l’autre option est de revaloriser les rémunérations”, analyse-t-elle.

Si cette solution permet des rattrapages, il est étonnant qu’elle fasse son apparition seulement maintenant. “Techniquement des choses sont possibles pour cette phase de transition comme la revalorisation des droits acquis pour les fonctionnaires et les agents des régimes spéciaux. Mais il est inacceptable qu’en trois mois de discussions ces hypothèses n’aient pas été mises sur la table”, regrette Frédéric Sève de la CFDT. Même constat du côté de son homologue de l’Unsa, Dominique Corona. “Ce qui a toujours été évoqué est que cette photographie au moment de la transition se faisait sur la base d’un départ à la retraite avec un taux plein, sans décote ni surcote, détaille-t-il. Alors peut être que l’on pourrait ajouter un cadeau de bienvenue mais il n’en a jamais été question avec le haut-commissaire. On est dans le money time donc on lance des pistes”, ironise-t-il.

Il est aussi difficile de savoir à quoi pourrait ressembler ces compensations lors de la phase de transition sans savoir qui seront les premières générations concernées par la mise en place du régime universel, ni la durée de la phase de transition entre les deux régimes. “Il nous faut des cas type pour savoir ensuite quelles mesures de rattrapage on peut mettre en place”, réclame Dominique Corona. Et finalement ce ne sera peut-être pas le principal critère à prendre en compte. “Au-delà de cette question de la transition, ce qui aura le plus d’impact sur le niveau de la future pension c’est la façon dont seront revalorisés vos droits acquis”, prévient Valérie Batigne. Bref, retour à la case départ avec toujours les mêmes questions sur la valeur du point et les personnes qui seront concernées par la réforme. Des interrogations qui durent et qui pourraient être levées ce mercredi, lors des annonces du Premier ministre, Édouard Philippe.