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Jean-Luc Mélenchon a été jugé, ce lundi, à Bobigny, pour les incidents lors de la perquisition au siège de LFI en octobre 2018.
© Sipa Press

Condamné dans l’affaire des perquisitions, Mélenchon se pose en «rebelle officiel»

L’épisode n’en finit plus d’empoisonner la vie de La France insoumise depuis un an, et a entraîné son retour à des positions contestataires

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Jean-Luc Mélenchon a été condamné lundi à trois mois de prison avec sursis et 8 000 euros d’amende par le tribunal de Bobigny pour les incidents ultra-médiatisés qui ont émaillé les perquisitions dans les locaux de La France insoumise et au domicile de certains de ses dirigeants, l’an dernier.

Trois mois de prison avec sursis et 8 000 euros d’amende. Plus d’un an après les fameuses perquisitions à son domicile et au siège de La France insoumise (LFI), Jean-Luc Mélenchon a bien été reconnu coupable de rébellion par le tribunal de grande instance de Bobigny. Les magistrats ont suivi les réquisitions du ministère public, relativement clémentes au regard des infractions qui lui étaient initialement reprochées. Pas de prison ferme ni de peine d’inéligibilité donc, mais des dommages politiques dont il est encore difficile de mesurer l’étendue.

C’est d’ailleurs le cœur de la complainte du député des Bouches-du-Rhône qui ne cesse de crier au « procès politique » depuis ce jour d’octobre 2018. « Tout le monde comprend que c’est une comédie judiciaire pour me flétrir », a-t-il une nouvelle fois assuré lundi après le jugement. Jean-Luc Mélenchon aura eu recours à tous les registres pour sa défense. L’indignation surtout, l’humour parfois. Il s’est surtout attaché à dénoncer une « instrumentalisation de la justice et de la police » contre laquelle il mène désormais un bras de fer d’une rare intensité.

Depuis la publication en septembre d’un livre spécialement dédié à sa défense, le président du groupe parlementaire LFI à l’Assemblée lie ainsi son sort à celui des manifestants condamnés par la justice depuis un an. « Avant moi, 3000 Gilets jaunes ont été amenés au tribunal et condamnés, 1000 à de la prison ferme, 22 personnes éborgnées ! a-t-il souligné lundi sur le parvis du tribunal de Bobigny. Tout cela est une sorte d’hiver un peu pénible pour la France ».

Plus étonnant, alors qu’il s’était jusqu’ici élevé contre les parallèles faits avec d’autres procédures visant des responsables politiques, Jean-Luc Mélenchon a estimé qu’elles participaient du même « n’importe quoi judiciaire ». « C’est vrai pour nous les opposants, mais les macronistes règlent aussi leurs comptes avec leurs amis comme ça. C’est le cas de M. Collomb et de M. Bayrou qui étaient des amis gênants et qui, eux aussi, se retrouvent maintenant à avoir maille à partir avec la justice », a-t-il affirmé.

« Férocité de classe ». Vendredi, le maire de Pau et président du MoDem a été mis en examen dans l’affaire des assistants parlementaires de son parti au Parlement européen. C’est d’ailleurs dans le cadre d’une enquête concernant des faits similaires qu’une partie des perquisitions contre LFI avait été ordonnée l’année dernière, bien qu’on n’en connaisse toujours pas l’issue. Ce dossier, couplé à celui relatif aux comptes de la campagne présidentielle de Jean-Luc Mélenchon en 2017, constitue toujours une épée de Damoclès suspendue au-dessus du leader insoumis. L’incertitude parasite non seulement sa stratégie politique mais a également déjà provoqué une inflexion de son discours.

Car, si l’ancien candidat à la présidentielle était parvenu il y a deux ans à incarner une figure rassurante, le feuilleton judiciaire et médiatique ouvert avec ces perquisitions a contribué à le repositionner dans un registre contestataire. Jean-Luc Mélenchon s’en prend depuis aux institutions, ce qui lui vaut d’ailleurs l’hostilité d’une partie des syndicats policiers. « La plupart d’entre nous, jusqu’à ce procès, avaient une confiance quasi totale mais nous avons été bien bêtes (...) ! Je n’ai pas vu que la police s’abandonnait à des violences incroyables sur certaines parties de la population et que les tribunaux jugeaient avec une férocité de classe absolument incroyable », a-t-il répété lundi au sortir du tribunal.

Dans l’immédiat, ces péripéties judiciaires perturbent le travail d’opposition du mouvement qui cherche encore et toujours à décrocher une première victoire politique contre Emmanuel Macron, cette fois à l’occasion du mouvement social contre la réforme des retraites. A long terme, cette stratégie de défiance des institutions se révélera-t-elle payante ? « Il aura fallu qu’on attende que j’aie 68 ans pour reconnaître qui je suis vraiment et, enfin, je suis un rebelle officiel ! », s’est amusé lundi Jean-Luc Mélenchon. Les scrutins à venir permettront de savoir si ses électeurs le suivent sur ce chemin.