https://www.lopinion.fr/sites/nb.com/files/styles/w_838/public/styles/paysage/public/images/2019/12/constantinos_herodotou_stavros_ioannides.jpg?itok=F4osIkLf
Constantinos Herodotou, président de la Banque centrale chypriote.
© Stavros Ioannides

Les banques chypriotes assurent avoir nettoyé les écuries d’Augias

Les établissements de l’île, en grande difficulté en 2008, expliquent détenir moins de crédits douteux et se montrer plus regardantes sur la clientèle

by

L’Association des banques chypriotes, fait la promotion d’un système financier assaini depuis la crise qui a secoué Chypre au début de la décennie.

Chypre n’est plus un paradis fiscal, ni le havre du blanchiment d’argent et des oligarques russes. C’est le message qu’est venue faire passer, l’Association bancaire chypriote (ACB) la semaine dernière à Bruxelles, Londres et Paris. Secouée par une crise financière en 2013 qui l’a amenée à demander de 10 milliards d’euros d’aides à l’UE et au FMI, l’île est aujourd’hui tirée d’affaire : taux de croissance supérieur à 4 % en moyenne, chômage redescendu à 6,6 % contre un pic de 16,1%.

Pour cela, il a fallu un grand ménage. « Cela a été douloureux. La somme des bilans bancaires représentait plus de huit fois le PIB en 2010, nous sommes revenus en dessous de trois fois. Le taux de créances douteuses a reculé, de plus de 50 % à un peu moins de 30 %. Nous sommes passés de 28 à moins de 10 milliards d’euros de crédits douteux, pour un PIB de 20 milliards. Cela reste élevé, mais nous allons réduire encore ce montant. Le secteur bancaire s’est consolidé, il est devenu plus robuste », détaille Michael Kammas, le directeur général de l’ACB, qui regroupe 10 établissements représentant plus de 90 % des actifs du secteur.

La restructuration de Bank of Cyprus et la liquidation de Laiki, les deux premières banques chypriotes, ont été suivies en 2018 par la fermeture de Cyprus Cooperative Bank, avec cession des bons actifs et des dépôts à Hellenic Bank. Conséquence, le poids de la clientèle russe a fondu : 4 % du total des dépôts, contre un plus haut à 10 %. « Nous ne cherchons plus à la retenir. Il s’agit d’un grand changement de culture. C’est parti du sommet jusqu’à la base, auprès de laquelle nous avons mené de gros efforts de formation pour faire de Chypre une destination financière propre et transparente », poursuit Michael Kammas.

«Le secteur est devenu très prudent au point que certains, à Chypre, se plaignent de notre timidité à prêter de l’argent»

« Nous devons être un des rares pays européens où la banque centrale a précisément défini ce qu’étaient des sociétés écrans et édicté des règles pour travailler avec elles. On n’ouvre plus un compte bancaire facilement. Nous devons procéder à de nombreux contrôles pour savoir d’où vient l’argent, et avoir accès à tous les audits financiers. Nous devons rencontrer en personne ceux qui ouvrent des comptes », précise Christoforos Livadiotis, responsable de la compliance chez Astrobank.

« Checks and balances ». Le secteur, et particulièrement ses trois établissements systémiques, reste placé sous la surveillance du FMI et de la BCE. « Nous vivons en permanence sous le système du checks and balances », dit-on du côté des banques, objets d’un récent rappel à l’ordre par Constantinos Herodotou, le gouverneur de leur banque centrale, pour leur politique en matière de crédits immobiliers. « Une piqûre de rappel car il y a une abondance de liquidités sur le marché, mais nous n’avons pas oublié les leçons du passé. Le secteur est devenu très prudent au point que certains, à Chypre, se plaignent de notre timidité à prêter de l’argent », dit Michael Kammas.

L’argent sale a-t-il pour autant totalement quitté l’île ? « Le risque existe toujours, mais nous faisons tout pour le limiter en adoptant des standards très stricts et en appliquant les directives édictées sur le sujet depuis 2014 », assure Matheos Charalambides, chief compliance officer d’Hellenic Bank.