[Édito] Côte d’Ivoire : la triste fable des trois éléphants
by Marwane Ben YahmedDans six mois, les candidats des principaux partis pour la présidentielle de 2020 seront désignés. Six mois pour retrouver la raison et sortir enfin d’une bataille des ego dans laquelle les désirs de revanche prennent le pas sur le débat démocratique et la confrontation des projets politiques.
«Oui, la Côte d’Ivoire doit continuer d’avancer, lance-t-il, mais pas avec n’importe qui. Nous avons vu dans le passé ce que d’autres ont fait. Nous ne voulons plus de retour en arrière ni de détournements. Car nos concitoyens ont de la mémoire. Quand je vois les hésitations de certains… C’est pour ça que je n’ai pas encore annoncé ma décision. Je veux que tous ceux de ma génération comprennent que notre temps est passé. […] Je ne souhaite pas être candidat, mon intime conviction est qu’après deux mandats il faut passer la main. J’aurai 78 ans l’année prochaine. Ce que l’on peut faire à 68 ans, on ne peut plus le faire à 78, a fortiori à 85 ou 86 ans. À partir de là, j’estime qu’il serait mieux que tous ceux de ma génération décident d’eux-mêmes de ne pas être candidat. Maintenant, s’ils décident néanmoins de l’être, compte tenu de leurs bilans et de leur incapacité à gérer la Côte d’Ivoire, je trouverai une autre solution, y compris celle de continuer. La Constitution m’autorise en effet à faire deux autres mandats, et je suis en parfaite santé… Mais ça ne veut pas dire que j’aie décidé d’y aller. »
Alassane Ouattara a de la suite dans les idées. À onze mois de la présidentielle et pour la troisième fois depuis juillet 2018, le chef de l’État ivoirien a, lors de sa tournée fin novembre-début décembre dans le Hambol, appelé de ses vœux un passage de témoin des hommes politiques de sa génération. Autrement dit lui-même, Henri Konan Bédié et Laurent Gbagbo – qu’il n’a pas souhaité citer. Félix Houphouët-Boigny, dont on a commémoré ce 7 décembre à Yamoussoukro l’anniversaire de la mort, a disparu il y a vingt-six ans. Depuis, les trois éléphants de la politique ivoirienne – 75 ans pour le plus « jeune », 85 ans pour le plus vieux – occupent le devant de la scène. Tous ont été tour à tour président et opposant.