Réforme des retraites : Delevoye « oublie » de déclarer ses liens avec le monde de l’Assurance
by Sudouest.frEn plein conflit sur la réforme des retraites, les révélations concernant Jean-Paul Delevoye sur ses liens avec un institut de formation dans les assurances a poussé le haut-commissaire à démissionner de cette fonction
La fonction d’administrateur de l’institut de formation de l’assurance est bénévole, mais symbolique… D’autant plus quand celui qui l’occupe est haut-commissaire à la réforme des retraites, Jean-Paul Delevoye. Et pourtant, aucune référence à cette fonction n’apparaît dans sa déclaration d’intérêts publiée samedi.
Le ministre délégué admet une « erreur » mais affirme qu’il s’agit d’une « omission par oubli » en réponse aux révélations du quotidien « Le Parisien ».
En plein conflit sur la réforme des retraites, la révélation par Le Parisien que Jean-Paul Delevoye n’a pas déclaré sa fonction d’administrateur bénévole d’un institut de formation dans les assurances a poussé le haut-commissaire à démissionner de cette fonction, objet de nombreuses critiques politiques.
« Pas pensé une seconde »
La déclaration d’intérêts du ministre délégué, publiée samedi selon le quotidien et visible sur le site de la Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP), ne mentionne pas sa fonction d’administrateur de l’Institut de formation de la profession de l’assurance (Ifpass) qu’il occupe depuis 2016 (voir encadré).
De ce fait, il est considéré comme « étroitement lié avec le monde de l’assurance ». « Les liens avec Jean-Paul Delevoye sont précieux, notamment parce que l’ensemble du secteur est intéressé par la réforme » de la retraite, confirme une source interne de cet institut.
Une « erreur » et « une omission par oubli », a réagi Jean-Paul Delevoye au Parisien. Il dit « n’y (avoir) pas pensé une seconde », en reconnaissant que « ce n’est pas responsable ».
« Pour clore toute polémique, j’ai démissionné ce matin de mes fonctions d’administrateur de l’Ifpass » avec effet immédiat, a annoncé le haut-commissaire dans un communiqué publié ce lundi, précisant n’avoir assisté « qu’à trois conseils d’administration » depuis qu’il s’est vu confier le chantier des retraites en octobre 2017, la dernière fois « en décembre 2018 ».
« Pousser les retraités vers des fonds d’assurance »
En plein conflit social sur la réforme des retraites, l’information a suscité immédiatement des réactions dans les rangs de la gauche et de la droite. À travers son haut-commissaire « on voit le vrai visage de cette réforme des retraites », où « tout est fait pour pousser les futurs retraités vers des fonds d’assurance », a dénoncé le secrétaire national du PCF Fabien Roussel sur Public Sénat.
« Monsieur Delevoye peut mettre à la taxe tout le pays sur les retraites et oublier une partie de ses déclarations d’intérêt, ça c’est pas un problème », a fustigé le leader de la France Insoumise, Jean-Luc Mélenchon, après sa condamnation lundi à trois mois de prison avec sursis par le tribunal correctionnel de Bobigny pour rébellion et provocation lors de la perquisition agitée au siège de son parti en octobre 2018.
À droite, la députée Les Républicains Valérie Boyer a jugé que « la macronie a quelque chose de désespérant dans sa constance à donner des leçons de morale et se croire au-dessus des règles ».
Pour Marine Le Pen, cet épisode est « une nouvelle illustration » de la politique d’Emmanuel Macron, qui « ne gouverne pas dans l’intérêt des Français: il déconstruit tout notre modèle au profit d’intérêts particuliers et de puissances d’argent ».
« C’est gênant », a de son côté estimé le secrétaire général de la CGT et opposant à la réforme, Philippe Martinez, car « on voit que dans la période, les assureurs privés montrent plus que le bout de leur nez ».
« On est dans quelque chose de totalement dérisoire », a en revanche déclaré sur LCI le patron des députés LREM Gilles Le Gendre, défendant « une fonction entièrement bénévole, qu’il n’a pas exercée de façon régulière et n’exerce plus ». Et d’ajouter « Nous avons sacrément besoin de lui ».
Ce qu’il avait déclaré
Suite à son entrée au gouvernement en septembre, Jean-Paul Delevoye a dû se soumettre à la désormais traditionnelle déclaration d’intérêts publiée sur le site de la Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP). Il y déclare tous ses revenus, et notamment le cumul de son salaire de ministre à 10135 euros brut avec ses pensions de retraite liées à d’anciennes fonctions.
Il mentionne également sa fonction de « président du think-tank Parallaxe de HEP Education au sein du groupe de formation IGS » depuis 2017, un poste rémunéré en 2018 et 2019 à hauteur de 5368,38 euros mensuels, soit un montant annuel de 64420 euros net. Y figure aussi, concernant ses activités passées, entre 2016 et 2017, une fonction de conseiller du délégué général d’IGS (25000 euros net en 2016 et 40000 euros net en 2017).
Jean-Paul Delevoye mentionne même son poste de président d’une association des orchestres nationaux, appelée la Chartreuse de Neuville, au rang des fonctions bénévoles « susceptibles de faire naître un conflit d’intérêts. » En revanche, aucune mention du siège d’administrateur au sein de l’Ifsass qu’il occupe depuis 2016.