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Jeudi a été l'une des journées les plus sanglantes de la contestation anti-corruption en Irak avec 46 morts. Photo Haidar HAMDANI/AFP
IRAK

Sous pression de la rue, le gouvernement va démissionner

Après deux mois de contestation déjà marqués par plus de 400 morts, le premier ministre irakien Adel Abdel Mahdi a annoncé sa démission et celle de son gouvernement. Le Parlement doit l'examiner ce dimanche.

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Les protestataires réclament depuis le 1er octobre «la chute du régime» : ils viennent d'obtenir une première victoire. Ce vendredi, le premier ministre Adel Abdel Mahdi, un indépendant sans base partisane ni populaire, a annoncé qu’il allait présenter sa démission et celle de son gouvernement au Parlement.

Le poids déterminant du grand ayatollah Ali Sistani

Cette annonce intervient alors que quelques heures auparavant,  le grand ayatollah Ali Sistani, figure tutélaire de la politique dans le pays, avait appelé à remplacer le gouvernement.

Le dignitaire chiite de 89 ans apporte ainsi pour la première fois clairement son soutien - nécessaire pour faire et défaire les Premiers ministres - aux manifestants.

Pour éviter «le chaos et la destruction, le Parlement dont a émergé le gouvernement actuel est appelé à revoir le choix qu’il a fait», a exhorté un représentant du grand ayatollah Sistani, qui n’apparaît jamais en public.

46 morts jeudi, trois décès vendredi

Ce sermon intervient aussi alors que jeudi a été l'une des journées les plus sanglantes de la contestation avec 46 morts et un millier d'autres blessés. Cette répression a changé la donne dans le Sud, où des combattants tribaux sont sortis pour protéger les manifestants à Nassiriya alors que des hommes en civil ont tiré sur la foule dans la ville sainte chiite de Najaf, où le consulat iranien a été incendié.

Vendredi, la police a encore tué quinze manifestants à Nassiriya, à feu et à sang depuis la veille, tandis qu’un troisième était abattu par des tirs à balles réelles devant le siège d’un parti à Najaf, ont rapporté des témoins et des médecins.

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Des manifestantes anti-gouvernement à Basra, vendredi. Photo Hussein FALEH/AFP

La joie des contestataires

Et la rue reste sous pression : les manifestants veulent la fin du système politique conçu par les Américains après la chute en 2003 de Saddam Hussein et désormais sous la mainmise de l'Iran, qui a pris l'avantage dans un pays où un habitant sur cinq vit sous le seuil de pauvreté.  Ils réclament aussi  le renouvellement d'une classe politique jugée corrompue et incompétente.

En tous cas, sur la place Tahrir de Bagdad, épicentre de la contestation, à l'annonce de ces démissions, la foule a explosé de joie. Les manifestants ont abandonné les pierres qu’ils jetaient sur les policiers pour danser après l’annonce par M. Abdel Mahdi de son intention de démissionner. Mais dans la rue, les manifestants veulent plus: la fin du système politique post-Saddam Hussein conçu par les Américains et désormais sous la mainmise de l’Iran, qui a pris l’avantage face aux Etats-Unis.

En Irak, un des plus riches en pétrole du monde, un habitant sur cinq vit sous le seuil de pauvreté et les infrastructures sont délabrées alors qu’en seize ans, l’équivalent de deux fois le PIB s’est évaporé dans les poches de politiciens et d’entrepreneurs véreux. Le Parlement doit se réunir dimanche alors que, jamais, depuis la chute de Saddam Hussein en 2003, un Premier ministre n’a quitté son poste avant la fin de son mandat.

Il faudra ensuite «mettre en place les réformes exigées par le peuple», a prévenu vendredi Washington.