Les plaintes pour harcèlement au travail se multiplient
by valeursactuelles.comLa notion de harcèlement serait présente dans 20 à 30% des contentieux lors de licenciements, selon l’avocat David Jonin.
L’affaire Weinstein et le mouvement MeToo qui en a suivi, depuis 2017, ont semble-t-il donné lieu à une prise de conscience de la part du monde de l’entreprise quant aux situations de harcèlement, qu’il soit moral ou sexuel. Une libération de la parole et davantage de recours à la justice dont témoignent trois avocats interrogés par Le Figaro.
« La loi est arrivée à une certaine maturité »
Le premier constat, bien qu’aucun résultat officiel n’en atteste, est que le nombre de cas de harcèlement, moral ou sexuel, a explosé ces derniers mois. « Aujourd’hui, la notion de harcèlement est présente dans 20 à 30% des contentieux sur le licenciement. C’est plus qu’il y a dix ans », indique l’avocat David Jonin, avocat associé au cabinet Gide Loyrette Nouel. Une tendance que sa consoeur Sabrina Kemel, spécialisée en droit social au cabinet Jeantet, est en mesure de confirmer. « S’il y a moins de contentieux, plus de 50% des assignations prud’homales évoquent des faits de harcèlement moral », ajoute-t-elle. Ainsi, elle dit être intervenue sur « quatre dossiers suite à des plaintes pénales pour harcèlement moral au travail » au cours des six derniers mois.
Reste que les harcèlements d’ordre moral ou sexuel, qui se traduisent par des « comportements inconvenants », sont des notions à la définition « imprécise », selon Diane Reboursier, avocate en droit du travail au cabinet Auguste Dedouzy. Le harcèlement n’est en outre pas forcément vertical descendant. « On trouve aussi du harcèlement vertical ascendant, horizontal (entre collègues), voire de tiers (clients, fournisseurs) », fait-elle valoir. Le temps passant, les tribunaux appréhendent de mieux en mieux ces cas de harcèlement. « Cela montre que la loi est arrivée à une certaine maturité. Aujourd’hui, on peut avoir plusieurs illustrations de ce qu’est précisément une affaire de harcèlement, et comment elle a été jugée », salue Me Jonin.
« Le non-bien-être au travail, ce n’est pas du harcèlement »
Mais le tableau n’est pas immaculé. « Dans bon nombre d’affaires qui nous sont confiées, la notion est dévoyée et que des comportements sont qualifiés à tort de harcèlement moral par le salarié alors qu’il ne s’agit que de contraintes inhérentes au travail », déplore Me Reboursier. « Autrement dit, le non-bien-être au travail, ce n’est pas du harcèlement moral ». Enfin, les ordonnances travail et l’instauration du « barème Macron », qui plafonne les indemnités pour licenciement abusif, pourraient en partie expliquer la hausse du nombre de plaintes pour harcèlement. Me Reboursier, en tout cas, constate « une augmentation des demandes à ce titre liées à l’entrée en vigueur du barème Macron ».